Le style italien : l’élégance en toute circonstance
Si vous avez déjà franchi la frontière italienne, ou seulement rencontré quelques specimen du genre masculin transalpin, vous avez forcément remarqué que quelque chose de spécial émanait de certains d’entre eux. Une espèce de charme inné, une élégance solaire, travaillée jusque dans les moindres détails et subtilement teintée d’exubérance méditerranéenne.
On ne parle pas ici des frasques outrancières d’un Aldo Maccione ou des débordements de testostérone des chanteurs romantiques qui sévissent là-bas depuis des années, mais plutôt de ces quasi-dandy avant l’heure, arborant chemises et vestes en toute circonstance, fiers ambassadeurs d’une histoire de mode et de textiles séculaire et garants d’un savoir-faire envié par le monde entier.
La plupart du temps, lorsque l’on parle de ce qu’on pourrait appeler « l’esprit italien », ce sont des images un petit peu tronquées qui arrivent, des déferlantes de combinaisons un peu hasardeuses, des couleurs en pagaille, un peu de provocation voire une attitude m’as-tu-vu. Ce n’est évidemment pas cet aspect-là de la mise italienne qui nous intéresse, même si l’on ne peut pas renier que certains mâles ont là-bas un besoin effréné de prouver leur masculinité, mais plus la « chic décontraction » qui a toujours plané sur le style masculin italien et ce, sans doute depuis les années 50-60 .
Une période qui voit s’envoler le marasme post 39-45 et ses restrictions pour céder à une « Dolce Vita » salvatrice. On passe ses étés sur la côte amalfitaine et l’ambiance St Tropez est courue. Le soleil règne en maître sur les esprits et les aspirations et la beauté du corps sont consacrées à toute occasion. On découvre des chanteurs, acteurs et actrices magnifiques.
C’est l’époque des Fellini, Visconti, Zeffirelli ou Pasolini, à la fois réalisateurs et poètes, esthètes avant-gardistes propulsant à l’écran de nouveaux modèles masculins et féminins dans lesquels tout le monde a envie de se retrouver, y compris hors des frontières du pays ;
Jeune homme séduisant portant des lunettes de soleil faisant un geste italien avec la main et les doigts confiants BS@Aaron Amat
Les icones du style :
Vittorio Gassman
C'est l’un des plus grands acteurs du cinéma italien. Il naît à Gênes en 1922 et débute dans « Preludio d’amore » de Giovanni Paolucci en 1924. Son physique de jeune premier athlétique et séduisant lui permet de percer très vite et d’obtenir des rôles importants sans tarder. Il apparaît ainsi successivement dans « Trahison » en 1951 de Riccardo Freda, dans « Riz Amer » en1948 de De Santis, dans un Comencini en 1952. Il intéresse vite Hollywood qui commence à lui faire des propositions, et il y séjournera et tournera plusieurs films qui resteront pourtant assez confidentiels. De retour au pays, il fait un triomphe dans » Le Pigeon », une comédie burlesque, dans laquelle il interprète un petit voleur. Ce rôle va lui permettre d’accéder à des projets essentiels auprès de grands réalisateurs comme Dino Risi, (Parfum de femmes en1974). Il joue ensuite dans deux films de Robert Altman et tient le rôle titre dans « Benvenuta »d’André Delvaux, puis en France, dans « La Vie est un roman « (1982) d’Alain Resnais. C’est aussi et parallèlement un grand homme de théâtre qui fonde sa propre troupe en 1952. Il a également adapté au cinéma le « Kean » de Jean-Paul Sartre, passe derrière la caméra pour réaliser deux films : « Sans famille » et « Di padre in figlio ». Il obtient le Lion d’Or à la Mostra de Venise en 1995 pour l’ensemble de sa carrière et meurt à Rome le 29 juin 2000.
Son style : une allure de preppy à l’américaine, dans ses plus jeunes années, cheveux gominés, costumes sur-mesure avec cravates et pardessus impeccables lui donnent un aire de Cary Grant transalpin ou de Brando propre sur lui. Toujours d’une grande élégance, il suit le style des années 60 avec cette décontraction toute italienne qui le suivra jusqu’à la fin. Plus âgé, on le verra toujours arborer de très bons classiques masculins mais plus marqués, plus réfléchis et muris, avec toujours une touche d’individualisme en clin d’œil coloré ou par le biais d’accessoires un peu plus pointus.
Marcello Mastroianni :
Né en 1924, Marcello Mastroianni est sans doute l’un des plus célèbres et des plus appréciés des acteurs italiens. Une image absolue du charme « maison », sans ostentation, sans exubérance et très loin de certains clichés dont on a parlé au début de cet article. Il commence sa carrière d’artiste en s’inscrivant au Centre universitaire du théâtre en 1945, mais n’arrive pas à percer pendant de longues années, vivant ainsi très difficilement. Il lui faut attendre 1955 et le tournage de » Jours d’amour » de De Santis et Savona pour enfin obtenir un début de reconnaissance pourtant amplement méritée. Le succès grandit avec « Nuits blanches » en 1957, de Visconti et d’après un roman de Dostoïevski. En 1960, c’est le maestro Fellini qui lui propose le rôle de Marcello Rubini dans la mythique « Dolce Vita », à la suite duquel, il acquiert définitivement sa réputation de « latin lover » . Il tourne ainsi autant en Italie que dans le reste du monde, enchaînant les rôles pour De Sica, Antonioni, Fellini, Ettore Scola ou Bolognini, mais aussi avec Mikhalkov ou les français Bertrand Blier, Agnès Varda, le réalisateur grec Angelopoulos ou encore l’espagnol Raoul Ruiz. Il obtient le prix d’interprétation au Festival de Cannes, à San Sebastian la coupe Volpi à la Mostra de Venise, les distinctions pleuvent, mais ne ternissent en rien le désir de perfectionnisme de l’acteur dans la pratique de son art et sa simplicité unanimement reconnue. Il s’éteint le 19 décembre 1996 à Paris.
Le style Mastroianni : pure icône des belles années du cinéma italien, il est aussi un véritable sex symbol dans l’inconscient féminin collectif et parce que nombre de ses rôles de latin lover lui colleront à la peau. Souvent en costume uni, d’une grande sobriété, il apparaît dans la « Dolce Vita », avec un costume blanc sur chemise noire et foulard noir. Une sorte de négatif de son éternel costume noir, mais aussi une allure qui le porte vite au pinacle des tendanceurs de l’époque. Le mythe italien dans toute sa pureté et sa complexité. Grand amateurs de belles choses et de savoir-faire. Il ne porte que des chemises à poignets mousquetaires (french-cuffed shirts » en anglais), aux manches plus longues que la normale et portées uniquement avec des boutons de manchettes et ne sortait pas sans ses chaussettes en fil d’écosse Gammarelli, tailleur officiel des papes et des cardinaux au Vatican, et adorées de nombre de personnalités politiques et artistiques dans le monde. Des noirs, des blancs, des beiges, la gamme de couleur de son vestiaire est très classique et s’encoquine parfois de quelques vestes à carreaux ou de jeans. Sa dégaine nonchalante et typiquement latine s’assure de magnifiques costumes croisés sur les tapis rouges ou de smokings et mocassins informels. Il est aussi un des plus beaux ambassadeurs de la cravate fine monochrome.
Magasin de vêtements de luxe pour homme, l'industrie de la mode italienne. BS@195327439 pierwszy
Les prémices de la mode italienne masculine
On pense souvent à Milan comme capitale de la mode italienne mais le lien entre Florence et la mode est finalement plus ancien et prend ses racines dans les nombreuses corporations des métiers du tissu présentes dans la ville du 12ème au 15ème siècle. Ces associations consacrées aux arts et métiers sont à l’époque de véritables puissances économiques influençant la vie politique et culturelle et faisant un peu la pluie et le beau temps. Celles des métiers du tissu sont alors les plus importantes. Elles s’occupent de l’importation des matières, de leur transformation en étoffes délicates, puis de leur exportation et (ou) de la production de laines et de soieries. A grands renforts de prouesses et de mécénats culturels, elles se livrent de farouches batailles d’influence, et font ainsi les belles heures de l’architecture et de l’art florentin en général.
Une situation qui pourrait se rapprocher de celles des grands groupes textiles actuels soutenant de nombreux projets régionaux.
Il existe encore à Florence de belles réminiscences de ces années fastueuses, comme la magnifique Antico Setificio Fiorentino, une fabrique de soie datant de 1786 toujours en activité et produisant à la main et sur d’authentiques métiers à tisser d’époque, de splendides passementeries, des jacquards somptueux ou des damas d’exception.
Pour asseoir encore la position stratégique de Florence en tant que ville phare de la mode en Italie et dans le monde, s’il en est besoin, on peut aussi compter sur la présence sur son sol, d’une des plus grandes écoles de mode au monde, Polimoda, et du salon masculin incontournable :
Chaque année, le Pitti Uomo à Florence, est le rendez-vous mondial de la mode prêt-à-porter masculine, où se pressent d’ailleurs les journalistes, les influenceurs, acheteurs et autres acteurs importants du secteur.
On aurait pu croire que Milan était aussi the place to be en la matière et c’est pourtant bien à Florence qu’ont vu le jour les premiers défilés masculins en 1951, sous la direction de Giovanni Battista Giorgini, un financier toscan féru de mode exportant tout le savoir-faire italien outre-atlantique. Après avoir prêté ses propres locaux pour l’occasion, il décide de faire du palais Pitti le nouvel écrin de cet événement international et déjà se présentent entre ces murs vénérables, des maisons comme Gucci, Schiaparelli ou Ferragamo.
Les astuces à emprunter au style italien :
Homme au style italien en costume bleu chic avec ceinture cuir et montre BS@249368269 The Light Writer 33
Porter une veste version smart :
On choisit un blazer qui pourra se porter en toutes circonstances, y compris version chic. On pourra l’associer à de nombreux types de pantalons et il s’acclimatera à toutes nos envies de changements de looks.
concept vente, shopping, mode, style et les gens élégant jeune homme barbu brutal en costume choisissant veste dans le centre commercial ou magasin de vêtements. hommes costume parfait à dernier détail. Homme posant en costume noir BS@Chid87
Oser la couleur :
C’est un poncif de la mode italienne masculine et on signe plutôt deux fois qu’une ! Mettre un peu de couleurs dans son vestiaire c’est aussi en mettre dans sa vie. Bien sûr, il faut doser et savoir associer, et les risques sont plus grands qu’avec des tons neutres, mais on peut commencer par faire un peu détoner ses accessoires (cravate tendance verte ou rouge sur costard marine par exemple), et aller crescendo dans la « coloritude » !
Homme d'affaires masculin costume cravate. BS@Glazunov E.
Aimer les rayures :
on aime beaucoup les costumes rayés chez les latins ! Et plus particulièrement chez les italiens qui se sont fait une spécialité de ce type de motifs. Le best actuel ? Les rayures larges et sur fonds classiques type marine, gris ou beige en été.
L’art du dépareillé :
on n’hésite pas à porter sa veste de costume avec des pantalons en toile, des jeans ou même des pantalons de costumes différents. Attention, là-aussi c’est risqué et c’est plutôt réservé aux fashionaddicts, mais quand l’harmonie des lignes et des couleurs est respectée, ça en jette !
élégants accessoires cuir hommes chaussures et ceinture BS@vladakela
Des pieds toujours bien chaussés :
des mocassins portés pieds nus, aux derbies à boucles en passant par les car shoes sur chaussettes unies de couleurs et les sleepers, les italiens ont aussi le cuir et l’art de se chausser dans la peau. Il faut dire qu’en Italie, comme des costumes de très belles factures, on peut trouver de magnifiques chaussures à prix très raisonnables.
MILAN ITALY - JUNE 21: homme avec foulard posant devant le bâtiment du défilé de mode Ferragamo pour la Milan Men’s Fashion Week le 21 JUIN 2015 à Milan. @tinx
Des cravates en pagaille et de beaux foulards
Pour alterner : on connaît le succès des cravates italiennes à travers le monde et leur diversité de choix et de textures, mais on sait moins que les italiens sont aussi les précurseurs du port du foulard noué autour du cou, sans doute bien avant les anglais. On peut donc leur emprunter cette façon de twister les styles en alternant cravate et foulard selon ses envies et besoins.
Charles Edouard, Foulard Ascot soie, Victoria, cercles roses
Beau et attrayant jeune homme en plein air. Style de charme, avec lunettes de soleil et chemise. Barbe courte, couleurs chaudes. Beauté masculine. @Cordeschi
La passion des accessoires :
Ceintures, lunettes de soleil, bracelets, sacs, chapeaux, les transalpins cultivent l’art d’accessoiriser sans limites. Une bonne silhouette est toujours agrémentée de quelques goodies qui font la différence.
Les accessoires ceinture cuir, bords surpiqués 40mm, Rouge, ceinture cuir de veau, melon, 35mm ou le sac homme, SIMON CARTER, Hove brown en cuir, sont parfait dans le style.
Deux grands noms de la mode masculine italienne :
Nino Cerruti :
Créée en 1881, la maison Cerruti est une des rares maisons de mode aussi pérennes.
Implantés à Biella dans le piémont italien, les frères Cerruti transmettent la fabrique au père de Nino, qui lui lègue ensuite en 1950. Il crée alors la marque et la fait évoluer en une remarquable société de prêt-à-porter de luxe italien. Il présente sa première collection pour hommes en 1957 et crée dix ans plus tard, la marque Cerruti 1881, puis s’installe à Paris. Dans les années 80, il se diversifie avec de toutes nouvelles enseignes,
Cerruti Couture, Arte, Cerruti Jeans, Cerruti Brothers.Il devient le couturier attitré de nombreuses stars de cinéma comme Harrison Ford, Tom Hanks ou Michael Douglas, et se lance dans la parfumerie avec succès. Dans les années 2000, il cède ses parts de la société pour rejoindre la société familiale de Biella, mais reste à jamais une grande figure de la mode.
Giorgio Armani :
Le « Roi Georges », « Re Giorgio » , c’est ainsi qu’est surnommé le couturier dans le milieu de la mode. Né le 11 juillet 1934 à Plaisance, ce fils de famille très modeste passe ses jeunes années dans cette ville du nord de l’Italie. Il décide ensuite de tenter des études de médecine, mais abandonnant au bout de deux ans, il devient ensuite acheteur pour le grand magasin de luxe Rinascente en 1957. Très remarqué pour ses conseils avisés, il part ensuite travailler auprès du grand Cerruti comme styliste hommes, et travaille aussi pour d’autres maisons en indépendant. Suite à sa rencontre providentielle avec Sergio Galeotti, il co-crée la marque Giorgio Armani en 1975. Il habille de plus en plus de célébrités dont des stars hollywoodiennes comme Richard Gere, séduites par son style italian-chic et devient le deuxième créateur à faire la une du Time après Christian Dior. Il devient le spécialiste des costumes aux coupes et aux tombés parfaits, des tons neutres, comme les beiges, bleus ou gris et à ce jour, reste l’unique propriétaire du groupe Armani.
On l’aura compris, l’Italie est une terre bénie pour la mode et le raffinement masculin. Dès leur enfance (paraît-il), les garçons italiens apprennent le sens de l’esthétique, l’importance du « bien paraître » en toute circonstance. Une forme de respect des autres et de soi-même qui se transmet de génération en génération et a façonné ce fameux « chic à l’italienne » apprécié dans le monde entier. Pour conforter cette tradition, au milieu des grands groupes de mode internationalement reconnus, des savoir-faire ancestraux en matière de textile ou même de cordonnerie ou maroquinerie se perpétuent encore et font de l’Italie une plateforme incontournable du luxe et de la création artistique. Le mythe du latin lover n’en est donc pas tout à fait un, chez nos voisins transalpins, le style est presque inné et se mêle à cette charmante nonchalance propre aux caractères solaires du sud, pour devenir proprement irrésistible ! On aurait tort de ne pas leur emprunter quelques astuce!
Copyright Cravate Avenue
Medespoir - 13/06/2023 12:55:46
Nice post !