BMW M1 : L'Étoile Filante de la Bavière
Dans l’histoire de l’automobile, certaines voitures surgissent comme des éclairs de génie, bouleversant la donne à la fois sur le plan technique, sportif et culturel. Parmi ces « supercars » d’exception, la BMW M1 occupe une place singulière. Dévoilée à la fin des années 1970, elle est non seulement la première voiture à arborer le légendaire badge « M » (désignant la branche Motorsport de BMW), mais aussi un projet ambitieux conçu pour affirmer la capacité du constructeur bavarois à rivaliser, voire à dépasser, les références italiennes ou britanniques de l’époque. Pourtant, derrière son nom et ses lignes saisissantes, se cache une épopée pleine de rebondissements : collaborations avec Lamborghini, course à l’homologation, rivalités internes et retards à répétition. C’est cette odyssée hors du commun que nous vous invitons à découvrir dans les prochaines sections.
En remontant la genèse de la BMW M1, il faut se replacer dans le contexte des années 1970 : le sport automobile se transforme, les catégories Group 4 et Group 5 exigent des constructeurs des versions routières dérivées de leurs bolides, et les fans de vitesse réclament des machines de plus en plus performantes. BMW, déjà en pointe sur les berlines rapides avec la gamme 3.0 CSL ou les déclinaisons sportives de la Série 5, nourrit l’envie de créer une voiture purement « exotique », à moteur central-arrière et au design radical. Le coup de crayon est confié à Giorgetto Giugiaro (Italdesign), célèbre pour ses collaborations sur des icônes italiennes. De son côté, la structure mécanique – y compris le châssis tubulaire – est, au départ, sous-traitée à Lamborghini, signe du sérieux du projet. Malheureusement, la conjoncture économique et la situation financière délicate de la firme de Sant’Agata vont rapidement compliquer la donne, forçant BMW à reprendre la main et à assembler la M1 par ses propres moyens, en dispersant la production en divers lieux.
Lorsque la M1 voit finalement le jour en 1978, le public est subjugué : lignes basses, avant effilé, prises d’air latérales, capot arrière ajouré, phares escamotables… Tout respire la « supercar » d’inspiration transalpine, avec ce twist germanique dans le soin apporté à l’ergonomie et à la finition. Sous le capot, le six-cylindres en ligne M88, fort d’une injection Kugelfischer et d’une puissance de 277 ch (dans sa version routière), promet des performances de tout premier plan, culminant à plus de 260 km/h. Rapidement, la M1 vise les championnats Procar et brille sur piste, permettant à des pilotes de renom (Lauda, Piquet, Stuck, etc.) de s’affronter dans des courses-spectacles. Hélas, la complexité du programme, le coût élevé et la production artisanale limitent fortement les volumes. Au terme d’une carrière courte (1978-1981), seuls 453 exemplaires verront le jour, dont une grande partie en version route, le reste étant des Procar ou Group 4 de compétition.
Toutefois, la BMW M1 n’a jamais sombré dans l’oubli : sa rareté et sa beauté intemporelle, sa dimension historique (premier modèle « M » à part entière), et ses apparitions sur les circuits en font encore aujourd’hui une pièce maitresse de la collection automobile. Elle représente pour les passionnés un sommet de l’ingénierie bavaroise, préfigurant l’esprit Motorsport tel qu’on le retrouvera sur les M3, M5 et autres M6. Quelle est l’histoire de ce projet fou ? Quelles collaborations, quels drames, quels succès en compétition ? Comment s’organisait la production ? Quels chiffres clés caractérisent cette GT atypique ? C’est ce que nous verrons tout au long de cet article, dédié à l’une des plus charismatiques BMW jamais créées : la légendaire M1.
Aux Origines de la M1 : La Naissance d’un Projet Audacieux
Lorsque l’on évoque BMW, on pense immédiatement à ses berlines sportives, ses coupés élégants et ses succès en compétition (Tourisme, DTM, Endurance). Mais dans les années 1970, la firme bavaroise n’a encore jamais commercialisé de “véritable” supercar à moteur central. Jusqu’à cette époque, BMW s’illustre avec des propulsions “avant-moteur”, comme la 3.0 CSL, qu’on surnomme “Batmobile” en raison de son kit aérodynamique. Pour franchir un palier supplémentaire, affronter Ferrari et Porsche sur le terrain des GT d’exception, BMW pense alors à un concept radical : un coupé deux places à moteur central-arrière, capable de briller autant sur route que sur circuit.
L’émergence de Group 4 et Group 5 dans les règlements sportifs internationaux exige que les constructeurs produisent un certain nombre d’exemplaires routiers pour homologuer leurs voitures de course. BMW, qui souhaite s’engager sur ces championnats, se met en quête d’un partenaire capable de concevoir et de fabriquer rapidement un châssis adapté. Naturellement, Lamborghini apparaît comme un allié potentiel : la marque italienne excelle dans la production de GT à moteur central (Miura, Countach), et son expertise pourrait accélérer le processus. C’est ainsi qu’en 1976 se noue une collaboration visant à développer ce futur modèle, qui prendra plus tard le nom de code E26 et, définitivement, “M1” lors de son lancement.
Toutefois, Lamborghini traverse alors une période financière difficile. L’industrialisation de la M1 prend du retard, les coûts dérapent, et BMW se retrouve dans l’obligation de rapatrier une partie des fabrications ailleurs : le châssis tubulaire, la carrosserie en plastique (fibre de verre + résines), les éléments mécaniques, sont confiés à divers sous-traitants (Marchesi, Italdesign, Baur…) La situation devient rapidement chaotique, et la M1 accumule plus d’un an de retard. Sur le plan commercial, BMW craint de ne pas atteindre les quotas demandés pour l’homologation (400 exemplaires minimum). Malgré tout, l’insistance et la détermination de la division Motorsport (dirigée par Jochen Neerpasch) finissent par porter leurs fruits : en 1978, la M1 fait ses débuts officiels, à la fois en version routière et en version Procar, prête à en découdre sur la piste.
Cette genèse mouvementée fonde la légende de la M1 : un projet né d’un rêve, balloté par des considérations financières, techniques et sportives, qui aboutit finalement à la création d’une icône. Pour BMW, c’est aussi l’occasion d’inaugurer véritablement la division M (motorsport), future conceptrice des M3, M5, etc. Et si la M1 ne rencontre pas un succès commercial retentissant, elle ouvre la voie à la notoriété grandissante du département “M” et jette les bases de ce qu’on appellerait bientôt une “supercar de prestige à la sauce bavaroise”.
Italdesign, Lamborghini et Baur : Une Production Dispersée
La BMW M1 illustre bien la complexité de la chaîne de production, lorsque plusieurs entreprises collaborent sur un même projet, chacune apportant ses compétences. Concrètement, voici comment se répartissaient les rôles :
Style et carrosserie (Italdesign)
Le designer Giorgetto Giugiaro, fondateur d’Italdesign, est chargé de mettre en forme la silhouette de la M1. Il s’inspire des codes esthétiques des années 1970, aboutissant à un coupé très bas (1,14 m de hauteur) avec des lignes anguleuses, des phares escamotables, des jantes à 5 trous caractéristiques, et une calandre réduite au minimum. Les panneaux de carrosserie sont fabriqués en fibre de verre, un matériau léger et facile à mouler pour des formes complexes. Le style, à la fois italien et germanique, se veut fonctionnel, sans fioritures excessives, soulignant la “muscularité” du coupé.
Châssis tubulaire et suspensions (Lamborghini / Marchesi)
Au départ, la partie “ingénierie châssis” est confiée à Lamborghini, qui réalise un prototype de châssis tubulaire, inspiré de ses propres conceptions. Mais les ennuis financiers bloquent l’avancement. Finalement, c’est la société Marchesi (Italie) qui prend le relais pour fabriquer les châssis tubulaires en série. Les trains roulants (suspensions à double triangulation, amortisseurs, barres stabilisatrices) sont ensuite ajustés selon les directives de BMW Motorsport.
Assemblage partiel et finalisation (Baur / BMW)
Une fois la carrosserie en fibre de verre fabriquée par Italdesign, elle est fixée sur le châssis tubulaire. Ensuite, ce semi-fini est envoyé chez Baur, carrossier allemand spécialisé (déjà connu pour des transformations sur base BMW ou Mercedes), qui s’occupe de l’assemblage final : pose du moteur, de la boîte de vitesses, de l’habitacle, du système électrique, etc. Enfin, chaque M1 est testée et validée par BMW Motorsport avant livraison aux concessionnaires ou équipes de course.
Cette logistique, éparpillée entre l’Italie et l’Allemagne, rend la production lente et onéreuse. Les retards s’accumulent, la courbe d’apprentissage est abrupte pour tous les acteurs impliqués. Au total, la M1 est produite à 453 exemplaires (dont 399 versions routières et 54 versions de course), de 1978 à 1981. Les quotas d’homologation en Group 4 (400 exemplaires) ne sont guère atteints dans les délais initiaux, forçant BMW à improviser la Procar Series (sorte de championnat monotype) pour donner de la visibilité à la M1 en attendant d’entrer en compétition internationale. Malgré les difficultés, chaque M1 sortie d’usine dégage un sentiment d’exclusivité et de caractère digne des meilleures GT italiennes, reflétant la “co-production” italo-allemande qui l’a engendrée.
L'Élégance Signée Giugiaro et un ADN Course Affirmé
L’aspect visuel de la BMW M1 demeure l’un de ses atouts majeurs, révélant sa filiation avec les supercars italiennes tout en préservant une touche “BMW” identifiable. Principaux traits marquants :
Lignes anguleuses
Le coupé arbore un profil en coin, ponctué de plis nets. La face avant est quasiment plate, hébergeant deux phares escamotables surmontant de petits feux de position rectangulaires. Cette sobriété rehausse l’agressivité du bouclier avant doté d’ouïes d’aération. Sur le capot moteur arrière, des persiennes noires protègent la verrière et laissent s’échapper la chaleur du bloc six-cylindres.
Empattement court, voie large
La M1 se veut compacte (4,36 m de long, 1,63 m de large, 1,14 m de haut), avec un empattement contenu et des voies élargies. Les jantes spécifiques, dessinées par Campagnolo ou BBS (selon les versions), culminent en 16 pouces (assez grand pour l’époque), chaussées de gommes performantes (Pirelli P7 ou Michelin TRX).
Spoiler et aileron discrets
Contrairement à certaines rivales italiennes, la M1 reste mesurée dans son appendice aérodynamique : pas d’immense aileron, juste un discret pli sur la malle arrière, soulignant la fluidité. Les versions de course (Procar, Group 4) adoptent évidemment un kit carrosserie plus ostentatoire : élargissements d’ailes, ailerons imposants, etc.
Cockpit épuré
L’habitacle, pensé pour la conduite sportive, présente un combiné d’instruments ronds face au conducteur, une console centrale inclinée, des sièges baquets en cuir ou tissus (selon les options), et un volant sport 3 branches. L’ergonomie reste typique BMW : molette de ventilation, autoradio, commandes de phares. Bien que la visibilité arrière soit réduite (moteur central oblige), la position de conduite se révèle excellente, assise basse, jambes à l’horizontale, occupant un habitacle relativement spacieux pour un coupé de ce type. La finition, mixant plastiques et éléments tapissés de cuir, n’atteint certes pas la perfection artisanale d’un certain Made in Italy, mais reflète la rigueur allemande.
Châssis tubulaire et suspensions de course
Sur le plan technique, la M1 tire profit de ses origines “Group 4 / Group 5” : structure tubulaire en acier, suspensions indépendantes à triangles, amortisseurs réglables, barres anti-roulis, etc. Le tout aboutit à un poids contenu (env. 1 300-1 350 kg), permettant au moteur de s’exprimer pleinement. Les roues arrière motrices reçoivent la puissance via une boîte manuelle 5 rapports ZF, assurant des passages de vitesse précis et robustes.
En définitive, l’esthétique de la M1, associée à sa quasi-simple ligne racée, a su traverser les décennies sans vieillir. Aujourd’hui encore, on la considère comme l’une des BMW les plus pures jamais dessinées, tant par la main d’un grand styliste italien (Giugiaro) que par l’empreinte d’une mission sportive claire : triompher sur piste et fasciner sur route.
Le Six-Cylindres Surnommé "M88" : Cœur Battant de la M1
Au-delà du châssis et du style, la BMW M1 brille par son moteur, développé par la division Motorsport de la marque. Baptisé M88 (sur la version route) ou M49 (pour la compétition), ce six-cylindres en ligne 24 soupapes, injection Kugelfischer, incarne une synthèse du savoir-faire BMW en matière de blocs sportifs. Principales caractéristiques :
Cylindrée et puissance
Le M88 culmine à 3,5 L de cylindrée (3 453 cm³) et délivre environ 277 ch (DIN) à 6 500 tr/min, avec un couple de 330 N·m à 5 000 tr/min. Sur la version Procar (compétition “monotype”), la puissance grimpe à plus de 470 ch, tandis que les Group 4/5 homologués en endurance peuvent atteindre 800 ch avec turbo, selon les réglages adoptés. Sur route, la version “de base” offre déjà des accélérations musclées : 0 à 100 km/h en 5,6 s, vitesse maxi de ~260 km/h.
Architecture et typicité BMW
BMW est depuis longtemps adepte du “straight six” (6 en ligne), réputé pour sa douceur et son équilibre vibratoire. Le M88 ne fait pas exception : il offre un régime maxi de plus de 7 000 tr/min, un chant rauque et métallique, et une souplesse d’utilisation rare dans le segment des supercars. Avec la transmission ZF 5 vitesses, les rapports s’enchaînent sans effort, permettant à la M1 de briller aussi bien en conduite coulée sur route que dans les tours sur circuit.
Fiabilité et entretien
Comparée à certaines rivales italiennes, la M1 se montre relativement fiable, pourvu qu’on respecte l’entretien rigoureux (vidanges régulières, surveillance du circuit d’injection mécanique, gestion des joints et durits). Les mécanos formés sur les BMW “M” retrouveront des similitudes avec les futures M635 CSi ou M5 E28 (qui emploient des dérivés du bloc M88/S38). Les pièces de rechange, même si elles peuvent être onéreuses pour ce modèle rare, restent localisables via des clubs ou des spécialistes.
Polivalence contradictoire ?
BMW souhaitait une voiture de course “civilisable”, associant la brutalité potentielle d’un moteur 3,5 L sportif et la docilité d’une injection électronique. Résultat : la M1 offre une large plage de puissance dès 2 500 tr/min, tout en explosant au-delà de 5 500 tr/min. Le conducteur profite de la “poussée en continu” typique d’un 6 en ligne. Sur route, la maniabilité est excellente, mais la voiture exige un certain respect : pas d’aides électroniques, un empattement court et une puissance transmise aux seules roues arrière. Sur le mouillé, mieux vaut une conduite mesurée.
Ainsi, le M88 demeure l’âme de la M1. Même plus de quarante ans après, on considère ce moteur comme l’un des “Straight Six” les plus iconiques de l’histoire, poursuivant sa légende sur d’autres BMW M (M635 CSi, M5 E28). Dans la M1, ce bloc incarne parfaitement la mission “supercar” que s’était fixée BMW, fusionnant la tradition du 6 en ligne bavarois avec l’exigence d’un usage sportif radical.
Une Voiture de Connaisseurs : Célébrités, Pilotes et Passionnés
Du fait de sa rareté (453 exemplaires), la BMW M1 s’est vite imposée comme un “collector” convoité par les grands noms de la course et quelques amateurs fortunés. Parmi ceux-ci :
Niki Lauda
Le triple champion du monde F1 autrichien a piloté la M1 en Procar Series (1979-1980), remportant la première saison devant d’autres pilotes de renom. Il devient alors l’un des principaux ambassadeurs de la M1 sur les circuits, témoignant de la sportivité du modèle.
Nelson Piquet
Autre triple champion du monde, Piquet brille aussi en Procar, s’illustrant en duel face à Lauda. La M1 Procar, colorée aux couleurs de sponsors (comme BASF, Warsteiner, etc.), fait alors sensation dans le paddock F1, où chaque week-end, la course “Procar” réunit pilotes F1 et “privés”.
Paul Walker (rumeur)
L’acteur de la saga *Fast & Furious*, passionné d’automobiles, aurait, dit-on, cherché à acquérir une M1 pour sa collection. Bien qu’il ne soit pas certain qu’il en possédait réellement une, l’intérêt qu’il portait aux sportives rares en fait un prétendant logique.
Jay Leno
Le showman et collectionneur de voitures possède ou a possédé une M1, comme en témoigne sa websérie “Jay Leno’s Garage”, où il met en avant son amour des mécaniques exceptionnelles. Il apprécie particulièrement la polyvalence de la M1, capable de rouler en ville et de briller sur circuit.
En outre, de nombreux entrepreneurs, musiciens, ou pilotes amateurs ont un jour croisé la M1 sur leur chemin, attirés par son design radical et son statut d’objet culte. Contrairement à d’autres supercars flamboyantes, la M1 séduit une clientèle plus discrète, davantage centrée sur la technique et la passion. Son image “d’élite cachée” participe d’ailleurs à sa cote grandissante sur le marché de la collection, où chaque exemplaire en bon état se négocie à des prix dépassant parfois la barre des 600 000 €/$, voire davantage.
La M1 sur Écran : Apparitions, Documentaires et Culture Pop
La BMW M1 n’a pas la même notoriété cinématographique qu’une *DeLorean* (Retour vers le futur) ou une *Aston Martin DB5* (James Bond). Toutefois, elle est apparue sporadiquement dans différents médias :
Films et séries: On la voit brièvement dans certaines productions européennes ou américaines, utilisée comme la voiture d’un personnage fortuné ou collectionneur. Parfois, elle est confondue avec d’autres BMW plus récentes, la M1 étant souvent méconnue du grand public.
Documentaires automatiques: Nombre de reportages sur l’histoire de BMW, ou sur les supercars des années 1970-80, consacrent un passage à la M1, insistant sur son contexte de création, sa rareté, et la passion qu’elle suscite chez les puristes.
Jeux vidéo: Dans le monde ludique, la M1 est mieux représentée, figurant au catalogue de séries comme *Gran Turismo*, *Forza Motorsport*, *Need for Speed*, etc. Son look rétro et ses performances en font un choix apprécié des joueurs amateurs de conduite vintage.
Même si son impact médiatique ne rivalise pas avec certaines icônes, la M1 conserve cet aura “d’initié”, la rendant d’autant plus attrayante pour les férus de voitures rares. Finalement, sa présence sur le devant de la scène se concentre davantage dans le domaine de la compétition (Procar) et des expositions de clubs BMW ou salons rétro, où elle attire invariablement l’attention comme un joyau unique.
Anecdotes et Histoires Autour de la Légende M1
1. Procar Series, l’idée folle de Jochen Neerpasch
Neerpasch, directeur de BMW Motorsport, invente en 1979 la *Procar Series*, un championnat monotype où des M1 préparées à ~470 ch s’affrontent en lever de rideau des Grands Prix de F1. Les pilotes F1 officiels sont obligés d’y participer s’ils font partie des cinq meilleurs temps en essais libres. Le public adore, et Lauda / Piquet s’illustrent. Cette série durera deux ans seulement, mais marquera les esprits.
2. M1 AHG Studie / M1 Turbo
Certains préparateurs ou concept-cars ont fait évoluer la M1 de façon encore plus extrême : la “AHG Studie” propose un kit carrosserie large, un aileron proéminent et un moteur poussé à plus de 350 ch. De son côté, BMW a exploré, au niveau prototype, la M1 Turbo, avec suralimentation – un rêve resté dans les cartons.
3. M1 Ordner (voiture de sécurité) en DTM
Dans quelques manches de DTM (German Touring Car Championship) des années 1980, on a vu la M1 utilisée comme “voiture de service” ou “voiture ouvreuse”, soulignant la filiation Motorsport.
4. Rare exemplaire en Art Car
La BMW Art Car Collection compte une M1, peinte par l’artiste Andy Warhol (1979) ou Frank Stella (selon la version). Ces pièces uniques sont exposées dans des musées ou événements spéciaux, symbolisant le lien entre l’art contemporain et la course automobile.
5. Aileron post-équipement
La version routière de la M1 est livrée sans aileron imposant. Pourtant, de nombreux propriétaires ont ajouté par la suite un aileron, type Procar ou add-on, pour donner un look plus radical. Les puristes considèrent ce montage comme une entorse à l’authenticité, mais certains l’adorent pour l’agressivité supplémentaire qu’il procure visuellement.
Chacune de ces histoires renforce le statut mythique de la M1 : un concentré de passion, d’expérimentations plus ou moins abouties, et d’unicité assumée. Son côté “coupé rare” à l’histoire tourmentée lui confère un attrait particulier, d’autant plus que la production n’a duré que quelques années.
Tableau Récapitulatif : BMW M1 (1978-1981)
Le tableau ci-dessous (responsive, bordure 1px) synthétise les principales spécifications de la BMW M1 pour la version route (et un aperçu des versions Procar / Group 4).
| Version | Moteur | Cylindrée | Puissance | Couple | Performance | Production |
|---|---|---|---|---|---|---|
| M1 (route) (1978-1981) |
6-cyl. en ligne M88, injection Kugelfischer | 3 453 cm³ | 277 ch à 6 500 tr/min | 330 N·m à 5 000 tr/min | 0-100 km/h ~5,6 s Vmax ~260 km/h |
399 ex. (env.) |
| M1 Procar (1979-1980) |
6-cyl. M49 (dérivé M88) | ~3,5 L | 470 à 490 ch | -- | 0-100 km/h <4,5 s Vmax ~310 km/h |
Env. 40-50 ex. |
| M1 Group 4/5 (compétition) |
6-cyl. turbo possible | 3,5 L (variable) | jusqu’à 800 ch (turbo) | -- | Performances extrêmes selon réglages |
Qq exemplaires (course) |
Note : Les chiffres de production peuvent varier légèrement selon les sources. Au total, on recense 453 BMW M1 produites (compétition + route), dont environ 54 préparées pour la piste (Procar, Group 4). Les puissances indiquées sont des valeurs moyennes, la Procar variant selon la préparation (injection différente, etc.).
FAQ : 20 Questions Fréquemment Posées sur la BMW M1
Ci-dessous, un tableau de 20 questions recensant les interrogations les plus courantes autour de la BMW M1, abordant aussi bien l’historique, la technique, que la valeur de collection.
| Question | Réponse |
|---|---|
| 1. Quand la BMW M1 a-t-elle été produite ? | Entre 1978 et 1981, dans une configuration artisanale répartie entre Italie et Allemagne. |
| 2. Combien d’exemplaires existent-ils ? | Environ 453 exemplaires, dont 399 destinés à la route et ~54 versions de course. |
| 3. Pourquoi la M1 est-elle si rare ? | La production fut courte et complexe, Lamborghini ayant éprouvé des difficultés, BMW n’a pas pu poursuivre une production à grande échelle. Seulement 453 M1 ont été assemblées. |
| 4. Qui a dessiné la M1 ? | Giorgetto Giugiaro (Italdesign) est le principal designer, s’inspirant des lignes anguleuses de l’époque. |
| 5. Quels sont ses chiffres de performance ? | Dans sa version route (277 ch), la M1 réalise le 0-100 km/h en ~5,6 s, et atteint ~260 km/h en pointe. |
| 6. Qu’est-ce que la Procar Series ? | Un championnat monotype (1979-1980) créé par BMW autour de la M1, où des pilotes F1 se mesuraient lors de courses de soutien aux Grands Prix. |
| 7. Le moteur M88 a-t-il été utilisé dans d’autres modèles BMW ? | Oui, des variantes de ce bloc (M88/S38) ont équipé la M635 CSi (E24) et la M5 (E28), avec d’autres calibrages d’injection. |
| 8. La M1 est-elle la première “M” de BMW ? | Oui, c’est le premier véhicule officiellement développé par BMW Motorsport GmbH et arborant le badge “M” dès sa conception. |
| 9. Quid de la fiabilité ? | Globalement bonne, grâce au moteur M88 robuste. Le châssis tubulaire et la carrosserie en fibre de verre nécessitent un entretien soigné, et la rareté des pièces complique parfois les réparations. |
| 10. Quel est son prix actuel sur le marché ? | Cela varie entre 500 000 € et plus d’1 million d’euros pour des exemplaires particulièrement rares ou restaurés à l’état concours. |
| 11. Peut-on la conduire au quotidien ? | C’est possible, mais c’est une sportive à moteur central des années 1970, donc la visibilité arrière est limitée, le confort sonore est relatif et l’accès/sortie sont difficiles. La garde au sol est basse. |
| 12. La M1 a-t-elle gagné en compétition ? | En Procar, elle a brillé (ce championnat lui était dédié). En Group 4/5, elle obtient des résultats corrects, mais sa carrière est écourtée par l’évolution des règlements et la fin de la production. |
| 13. Comment se compare-t-elle à une Ferrari contemporaine (308, 512 BB) ? | La M1 a une puissance inférieure à la 512 BB, plus proche d’une 308 GTB, mais se démarque par son châssis plus rigide et sa facilité d’utilisation, tout en étant moins diffusée. |
| 14. Y a-t-il une version cabriolet ? | Officiellement non, BMW n’a jamais produit de M1 décapotable. Quelques prototypes ou transformations artisanales auraient existé, mais sans reconnaissance officielle. |
| 15. Quelle est sa masse ? | Environ 1 300 kg à sec, 1 360 kg en ordre de marche. La carrosserie en fibre de verre et le châssis tubulaire limitent le poids malgré le gros six-cylindres. |
| 16. Pourquoi la production a-t-elle été si faible ? | Les retards, la logistique complexe, les difficultés financières de Lamborghini, et l’arrivée de nouvelles réglementations ont freiné la production. BMW a arrêté après 453 exemplaires. |
| 17. Quel est l’héritage de la M1 dans la gamme BMW ? | Elle a inauguré la division M, qui produit ensuite les M3, M5, etc. Certaines solutions techniques (moteur M88, châssis) ont inspiré d’autres modèles “M”, mais la M1 reste unique dans sa configuration centrale arrière. |
| 18. Qui a assemblé la M1 en dernière étape ? | La société allemande Baur s’occupait de l’assemblage final, après la production des châssis en Italie. BMW finalisait ensuite le contrôle qualité. |
| 19. Quels coloris étaient proposés d’origine ? | Principalement le rouge (Henna Red), le blanc (Chamonix), le gris, le bleu, et le noir. Toutefois, la plupart des M1 sont rouges ou blanches dans l’inconscient collectif. |
| 20. Existe-t-il un projet moderne de M1 ? | BMW a dévoilé des concept-cars (M1 Hommage en 2008), mais jamais de réédition en série. La M1 reste un modèle sans successeur direct, si l’on excepte certaines hypercars conceptuelles signées BMW Vision. |
Derniers Échos d’un Mythe Bavaro-italien
Lorsque l’on évoque la BMW M1, on ne peut s’empêcher de penser à ce mélange improbable de compétences : un design signé Giugiaro, un châssis tubulaire d’inspiration Lamborghini, une carrosserie en composite, et un ensemble final orchestré par la firme bavaroise. C’est précisément cette hybridation qui lui confère son cachet unique, différent de toute autre BMW. Ce croisement de cultures et d’influences techniques a abouti à une supercar de haute volée, capable de rivaliser avec les Ferrari et Porsche de son époque, tout en affirmant la présence d’une marque qui, jusque-là, excellait surtout dans les berlines hautes performances.
Malgré la courte durée de production, la M1 a laissé un impact durable sur l’ADN de BMW. D’une part, elle a concrétisé la création de la division Motorsport (BMW M), désormais pilier incontournable de la marque. D’autre part, elle a démontré que la performance pure pouvait s’associer à une approche plus “germanique”, faite de rigueur, de qualité, et d’innovation raisonnée. En course, la M1 n’a pas eu le temps de déployer pleinement son potentiel en Groupe 5 (la réglementation évoluant sans cesse), mais la série Procar a marqué les esprits. Cette audacieuse compétition monotype a permis de faire briller la M1 sous les yeux du public des Grands Prix, tout en offrant à des pilotes légendaires un terrain de jeu sans pareil.
Sur le plan esthétique, la M1 demeure, encore aujourd’hui, un symbole de l’âge d’or des GT des années 1970-1980 : lignes pures, phares escamotables, proportions racées. De nombreux passionnés la considèrent comme l’une des plus belles productions BMW, évoquant à la fois l’exotisme italien et la sobriété allemande. Les rares modèles survivants, méticuleusement entretenus par des collectionneurs, atteignent des sommets lors de ventes aux enchères, témoignant de la reconnaissance universelle pour cette icône. Qu’il s’agisse de pièces rares (comme les versions Procar) ou d’exemplaires de route peu kilométrés, les cotes s’envolent à mesure que l’offre se restreint.
Au niveau historique, la M1 incarne aussi la dernière tentative de BMW de produire un “vrai” coupé à moteur central, car aucun successeur direct ne verra le jour. Les descendants spirituels de la M1 se retrouvent plutôt dans les M3, M5, M6, qui s’appuient sur l’héritage Motorsport, mais rebasculent le moteur à l’avant. Certains concept-cars (M1 Hommage, Vision M Next) suggèrent un désir latent de renouer avec cette architecture, sans toutefois se concrétiser. Ainsi, la M1 continue d’agir comme un “phantasme” dans la gamme BMW, un moment de bravoure dont la marque se souvient à travers des séries limitées et des hommages design.
Pour la postérité, la BMW M1 est donc une pièce maîtresse de l’histoire automobile : elle synthétise les ambitions contrariées d’un constructeur ambitieux, s’inscrit dans le sillage des supercars italiennes tout en proposant une exécution plus rigoureuse, et initie la légendaire lignée “M” chez BMW. C’est pourquoi chaque apparition de cette voiture en meeting, chaque rugissement de son six-cylindres, chaque témoignage d’un collectionneur qui la fait revivre sur route ou sur piste, suscite l’émotion. Au-delà de sa rareté, la M1 symbolise l’aventure technique et humaine, la passion pour le sport automobile, et la volonté d’innover malgré les obstacles. Bref, elle n’est pas qu’une BMW de plus, elle est un jalon intemporel où se mêlent ingénierie allemande, flair italien et frissons de la course, incarnant pour beaucoup le rêve ultime d’une époque dorée.
Par Antonio Sanchez. Pour Cravate Avenue
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